D'une seule voix... comme le terreau de l'espoir

Les mots sont le terreau de nos rêves, et de ceux à venir... Ce texte fort et sincère nous le montre brillamment.

                Au moins un donne la voix à une jeune fille qui décroche un travail et va se retrouver plongée dans le télémarketing. Avec son ton franc, presque rude parfois et c’en est gênant, Marie, l’héroïne, arrive finalement à nous convaincre, même s’il faut percer sa carapace, censée la protéger, forgée à force de s’être cloîtrée dans ce cocon de mots… Au moins un, comme tous les autres textes de la collection, vante le mérite des mots dans leur simplicité. Avec ceux-là, l’auteure raconte l’humain, ses rêves, le bien, qui se voit effrité par le mal, par le noir, par la peur, par la déception… Ici, on se retrouve confronté à un portrait au départ cliché, et finalement touchant d’une jeune fille à la frontière de la société. Irène Cohen-Janca va finalement nous faire comprendre qu’elle ne veut pas seulement nous montrer une humanité dévalorisée et pauvre, avec une héroïne qui se détache de cette communauté, un peu plus aimante des mots, un peu plus espérée et intelligente qu’on ne le croit,  mais qu’elle veut faire ressortir de ce texte parfois dur et violent, des mots forts et entêtants, qui nous donnent, à tous !, l’espoir qu’ils ne sont pas vains et qu’ils sont notre première ressource. Que les mots sont le terreau de nos rêves. Au moins un est un texte fort et sincère.

« Mais reste l’espérance violente. »

« Il y a des gens qui se souviennent des rêves des autres. »

Tout foutre en l'air

Premier jour au centre d’appels. Docile et résignée, Marie apprend les règles du télémarketing en open space : tournures de phrases positives, attitude calme en toutes circonstances, “le sourire qui s’entend” comme dit son superviseur. Mais quand on veut lui imposer de s’appeler Sonia, Marie sent qu’elle est en train de s’oublier. Jusqu’au jour où elle recroise Madame “Au moins un”, cette professeur de français qui recommandait à ses élèves d’apprendre au moins un poème par coeur : un poème pour soi, comme un abri pour se réfugier, n’importe où et n’importe quand. Revient en mémoire à la jeune fille le souvenir de son poème-portrait, “Marie” de Guillaume Apollinaire. Le déclic. Marie refuse de se laisser étouffer par cette formatrice au brushing parfait, par son petit ami Mickaël qui aimerait qu’elle soit un peu plus “comme tout le monde” et la trompe, et par sa mère qui voudrait qu’elle pense comme elle. Marie veut devenir coiffeuse. Et plus question de perdre ses rêves de vue.

Par Irène Cohen-Jaca

Aux éditions Actes Sud Junior - Collection D'une seule voix
96 pages
9 €