L’école des loisirs : tour d’horizon des grands albums de la maison
L’école des loisirs pour l’aventure
L’école des loisirs fait voyager les enfants depuis 50 ans. Dans tous les pays du monde, mais aussi de plein de façons différentes. Récemment c’était en camping-car, avec Magali Bonniol, mais il y a des années ce fut… à dos d’oiseau ! Dans L’Afrique de Zigomar, un grand classique de la maison, les couleurs éclatent et les personnages s’envolent. Avec une grande expressivité dans ses protagonistes drôles et attachants, Philippe Corentin emmène le lecteur à travers le monde dans un long voyage source de rêves… puis de peurs. Le jeu est ici sur le fantasme, et les rêves de voyage, qui poussent à partir. La curiosité est l’émotion à l’état pur qui traverse l’album, mais aussi ce désir de partir, et le courage. Le dessin est expressif, il prend vie sous les mots, et l’auteur nous fait voyager avec de drôle de trio qui nous parle d’amitié également. Finalement, le voyage sera peut-être raté, mais il faut un peu de courage dans la vie pour tenter l’aventure et le voyage, non ?
L’école des loisirs pour apprendre à grandir
En fait, le voyage de Zigomar tend à l’apprentissage, parfois terrifiant ou parfois blessant, de la vie par l’enfant. C’est le début d’un voyage initiatique, comme celui que raconte Anaïs Vaugelade avec Laurent tout seul. Ce petit lapin part seul à l’aventure parce qu’il est grand maintenant, et qu’il peut aller plus loin que la barrière, l’arbre ou la rivière. C’est avec une grande délicatesse, mais aussi avec des personnages exprimant de manière très touchante une mélancolie non cachée, qu’Anaïs Vaugelade traite ce thème. Laurent part pace qu’il est grand, et si sa maman lui manque, il va aussi découvrir des choses, et apprendre qu’un voyage tout seul, c’est bien plus triste. C’est dans ce basculement là, vers l’amour de deux lapins, que réussit l’émotion de l’album et la métaphore du voyage. La vie vaut bien la peine d’être vécue, quand on est deux. De quoi toucher les enfants, et émouvoir les parents. De quoi raconter avec justesse, le chemin de nos vies.
L’école des loisirs pour avoir peur
Jiang Hong Chen nous a offert, avec son Petit Pêcheur et le squelette, un condensé de peur. Une pêche saisissante dans le noir de son encre, qui se transforme en nuit et en mer terrifiante, amène un petit pêcheur à rencontrer un squelette. Il dégage une aura effroyable, une luminosité crue, et ses expressions sont trop réussies pour ne pas avoir peur. Puis le squelette révèlera ses secrets, dans une nuit devenue apaisée, et sous un matin bienveillant. Jiang Hong Chen confronte son lecteur à la peur à l’état pur, puis la lui fait dépasser. Au bout de tout ça, la bienveillance d’une rencontre, des sentiments qui font grandir. C’est avec ce style unique et cette force émotionnelle implacable que cet auteur est devenu un classique. Il sait écrire, raconter… et il sait peindre. La touche est grandiose, l’histoire intense, et les personnages touchants. Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de ce que peut faire la maison en termes de peur. Rappelons-nous des Trois brigands d‘Ungerer, par exemple, ou encore de Chien Bleu (Nadja), ou de Ponti.
L’école des loisirs pour l’émotion à l’état pur
L’école des loisirs, c’est aussi les émotions des enfants en brut. C’est Mireille d’Allancé, dans Grosse colère, qui relève le pari haut la main. Avec un style vif et doux à la fois, et un schéma narratif efficace, elle parle du sentiment de colère, exacerbé chez les enfants. Elle monte, elle prend tout l’estomac puis sort, grandit, encore et encore… puis explose. Elle traite du sentiment en l’étirant, de long en large, avec humour et intensité. Son dessin rond et chaud séduit, et son histoire provoque l’émotion, mais aussi le sourire, voire le rire. On n’a pas souvent vu l’émotion représentée de façon si vive et si réussie. Mireille d’Allancé invite l’enfant à la voir, à la crier, puis à l’éteindre avec tendresse. D’autres auteurs parlent d’émotions, ou de sentiments, de façons plus implicites : c’est l’amitié dans Loulou (Grégoire Solotareff), c’est la famille et l’amour dans Zou (Michel Gay).
L’école des loisirs pour l’impertinence
C’est ce que Susie Morgenstern a dit au salon du livre de Paris, sur l’identité de notre littérature jeunesse, et notamment celle de L’école des loisirs, à l’étranger : « c’est l’impertinence ! » L’école des loisirs le prouve depuis longtemps (avec Cornebidouille, ou Haut les pattes). Mais l’exemple le plus intéressant est la série d’albums de Stéphanie Blake, et son Simon insolent et malin. Ce lapin, c’est celui qui crie haut et fort, dès qu’on lui demande quelque chose : « Caca boudin ! » Avec un style adéquat – des dessins ronds et épais, des couleurs extrêmement vives et des personnages énergiques et piquants – elle bouleverse le monde bien tenu de l’album jeunesse. Ici, pas de grande illustration minutieuse ni de longues et belles phrases. C’est le rire, c’est les mots qui font rire les enfants, c’est l’interdit, c’est le mordant. La série de Stéphanie Blake est sans aucun doute une des plus brillantes de la maison, dans cette effronterie colorée, audacieuse, et endiablée.
L’école des loisirs et la création
La maison d’édition est sans aucun doute un espace de création riche et aventureux. Ça pétille, s’élance, s’envole, tremble, s’agite, de bagarre… Les personnages des albums de la maison se défient et s’encouragent, quand leurs auteurs créent et inventent, faisant de la maison l’une des plus belles du monde de l’édition française ; et peut-être la plus réputée. C’est Claude Ponti qui en est un des intrépides meneurs. Avec son dessin unique et décidé, un brin dérangeant, toujours hilarant, et sa prose rythmée et inventive, décalée et jouissive, il s’impose comme l’un des plus majestueux auteurs de la maison. Avec Blaise et le Kontrôleur de Kastatroffe, son dernier, mais déjà un classique, il ajoute une pierre d’importance à l’édifice. C’est avec une histoire singulière et efficace qu’il propose une nouvelle aventure de Blaise et des poussins. Son dessin minutieux fourmille de bonnes idées, entre peur et tendresse. Son écriture, elle, s’amuse des mots, les tourne et les détourne, dans une narration absolument hilarante, et parfaitement téméraire. Il joue des codes de l’album et de la narration pour s’en affranchir ou s’en servir, et joue, sans cesse, pour lui et avec l’enfant. Les personnages sont attachants, et l’histoire trépidante. Ça frétille d’idées et c’est brillant jusqu’au bout.
L’école des loisirs est alors, sans aucun doute, une incroyable maison d’édition, riche et libre, créatrice et singulière, pleine d’humour et d’émotions. 50 ans qu’ils font voyager les enfants et aussi les adultes à travers leurs albums tous des pépites. Et ce n’est pas fini !
Honte à moi je connais que les 3 brigands ^^'
RépondreSupprimerC'est vrai c'est un peu dommage ;)
SupprimerJe suis vraiment passée à côté de l'Ecole des Loisirs quand j'étais petite... j'étais team Gallimard avec les Drôles de Petites Bêtes et les Monsieurs-Madames :3
RépondreSupprimerJe les découvre du coup avec mon frère et ma sœur qui sont fans des Claude Ponti !
Quel dommage (même si Les Petites Bêtes ♥ et les Monsieurs-Madames ♥) heureusement que tu te rattrapes ;)
SupprimerAh je connais mieux, ça!! Il y en a que quelques uns que je ne connais pas parmi ceux que tu as présenté. --> je me rachète après la honte des romans. ^^
RépondreSupprimerOuf !! J'aime tellement cette maison, moi ♥
SupprimerChouette article *-*
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